NL FR
UN MONDE MAGIQUE ET FANTASTIQUE
Andre Vanderhaeghe

André Vanderhaeghe naquit à Wijtschate (Heuvelland) dans le paysage des collines de Flandre. Enfant et adolescent il vivait dans une famille qui respirait l’atmosphère de l’avant-guerre. Son père était maître-maçon et sa mère femme au foyer. André fut le cadet de six enfants dont trois sont morts très jeunes. La vie de famille était imprégnée de l’atmosphère lourde et pesante du ‘Westhoek’ encore sous l’emprise chrétienne. La doctrine catholique à laquelle son père attachait tant d’importance ne supportait pas la contradiction.

A l’âge de huit ans, au début de la guerre, André vit ses premières épreuves. La fuite en 1940 avec ses parents, son frère et deux membres de sa famille qui sont tombés sous les éclats d’obus fut à l’origine d’une profonde blessure. Etait-ce un cauchemar permanent, une hallucination?... Non, c’était la réalité!

L’occupation allemande et des tensions linguistiques le firent sans cesse basculer entre des écoles primaires néerlandophones et des écoles francophones.

Il y avait surtout le chemin de martyr de son frère aîné au camp de concentration de Buchenwald d’où il n’est pas revenu, comme tant de victimes innocentes… “Le meurtre commis par la raison et la religion de l’occident.” Aussi le poids des tabous de la civilisation occidentale avec son oppression de la sexualité ainsi qu’une puberté non accompagnée n’ont pas manqué leurs conséquences dans sa jeunesse.

Son esprit d’enfant fourmillait de questions sans réponses et d’images magiques.

A l’âge de 21 ans André se découvra. La pulsion inconsciente vers la vie fut la force intérieure qui l’arracha à ce monde artificiel. Ce fut comme le réveil d’un rêve, d’un sommeil mental où l’avaient enfermé l’enfance à la campagne, la guerre, les décès et les interdits…

Les expressions mystiques d’Eugeen Vansteenkiste, qui furent son premier contact avec le monde artistique, déclenchèrent en lui la pulsion à s’exprimer sur la toile.

Ses premiers coups de pinceau dressent une atmosphère angoissante encore dans une expression plutôt classique. A l’exception d’un bref passage de deux mois à l’académie des arts, André se fait son chemin libre d’autodidacte pour qui toutes les voies sont ouvertes. La lecture nourrit et mûrit sa quête de notre existence humaine. Avide de connaissance il questionne le monde et lui-même, le pourquoi du passé et de sa propre existence d’un quart de siècle déjà. Qui suis-je? Que fais-je dans ce monde? Où vais-je? La précarité de la vie… Ayant péniblement ressenti les interdits de l’ ‘Uber-Ich’, le subconscient et l’inconscient n‘échappent pas à sa quête spirituelle.

Ainsi s’éveille en lui le surréaliste qui, sans faire appel à la raison, confie à la toile son existence intime et inconsciente. C’est la période marquée par une maturation et par une intelligence plus large et libre des modes de vie. Les profondeurs inépuisables de l’inconscient ne cessent de le fasciner.

Ses premières peintures surréalistes, principalement en teintes rouge bleue, peuvent être qualifiées d’un ‘romantisme psychique’ qui pénètre dans l’inconscient de notre être humain. Parfois macabres, ells sont issues des frustrations refoulées de la petite enfance.

En procédant comme un spéléologue le surréaliste descend dans les profondeurs et les trésors de notre âme, et dans l’âme de tout être vivant qui anime notre conscience. ‘Het kunstwerk’ (‘l’oeuvre d’art’) en est l’expression. Vivre et revivre intensément le rêve.

Sans censure ni critique, il subit l’explosion de notre être et la pleine lumière du jour. L’artiste est en quête d’un autre monde où les valeurs humaines ne sont pas les mêmes. Un peu comme Arthur Rimbaud qui dit que “la vraie vie est ailleurs”.

Ces oeuvres surréalistes ne cessent de nous révéler le revers du ‘miroir romantique’. En coupant l’accès à l’oeil physique, ils nous font dé-couvrir le chemin vers l’inconscient. Ils font voir ce que nous avons ressenti sur le ‘chemin vers l’obscurité’. Le surréalisme efface la contradiction entre le rêve et la réalité.

La constante tout au long des périodes successives, c’est l’atmosphère d’une surréalité, de magie et de fantasme.

Elle reflète le caractère intime et spontané de ses expressions sur la toile.

On voit surgir le bouillonnement des fleurs et des feuilles, les nus sensuels, les paysages de rêve et finalement le “design”, celui étant l’épuration aux pures couleurs et aux purs mouvements de tout ce qui précédait.